GEORGES SIFFREDI Rubrique

Les Hauts-de-Seine avec l’Arménie, par Georges Siffredi


En cette année 2021, la relation du Département des Hauts-de-Seine avec l’Arménie revêt une dimension toute particulière, car un ami nous manque : plus d’un an après sa brutale disparition, Patrick Devedjian laisse un vide immense parmi la communauté arménienne. Nous savons combien il a œuvré, tout au long de sa vie, avec la ferveur et la détermination que nous lui connaissions, pour défendre la mémoire des Arméniens et faire reconnaître le premier génocide du XXe siècle, en France et au-delà.

Plus de cent ans après ces massacres, la résistance est toujours à l’œuvre et les plaies ont bien du mal à se refermer. La reconnaissance officielle de ces événements tragiques – toujours niés par l’Etat turc – avance à pas comptés dans le monde, de nombreux pays restant aveugles ou passifs sur la question. Il a fallu attendre cette année pour que le Président américain reconnaisse enfin le génocide arménien. Et chacun se rappelle du parcours semé d’embûches qui, il y a vingt ans, avait conduit le Parlement français à affirmer officiellement cette reconnaissance en 2001. Lors du vote de cette loi, Patrick Devedjian avait eu, devant l’Assemblée nationale, ces mots qui disent avec justesse le sens de ce combat : « Il ne s’agit pas, pour les descendants des victimes, de crier vengeance, mais seulement d’enterrer leurs morts dans un linceul qui ne peut être que la vérité ».

Le génocide arménien reste un traumatisme d’autant plus douloureux que le peuple arménien vit toujours sous de multiples menaces, comme l’a rappelé le conflit meurtrier déclenché à l’automne par l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabagh, avec le soutien opérationnel de la Turquie. En témoignage de solidarité, en décembre dernier, le conseil départemental des Hauts-de-Seine a adopté à l’unanimité un vœu, adressé au Président de la République et au Gouvernement, appelant à reconnaître la République du Haut-Karabagh, et demandant l’ouverture d’une enquête internationale suite aux informations faisant état de crimes de guerre et de l’usage d’armes prohibées par le droit international.

Il faudra du temps pour surmonter ces épreuves et assurer aux Arméniens la paix et la sécurité auxquelles ils ont droit. Au-delà des relations diplomatiques entre les États, c’est aussi par la coopération et l’entraide entre les peuples que nous pouvons participer à cet effort, avec autant de patience que de détermination. C’est le sens du programme de coopération agricole que nous mettons en œuvre depuis plus de dix ans, en partenariat avec le Fonds Arménien de France, dans le Tavouch, région fortement marquée par la déstabilisation du pays à l’automne, et qui a accueilli de nombreux réfugiés. Cette coopération, exemplaire et innovante, constitue une nouvelle page d’une histoire ancienne entre l’Arménie et les Hauts-de-Seine.

Notre Département, comme tant d’autres territoires de France, s’est construit par le brassage de populations exilées venues, d’Arménie et d’ailleurs, s’y installer, pour y trouver un avenir meilleur. L’histoire de nombreuses familles alto-séquanaises est donc intimement liée aux drames du passé et au souvenir des tragédies génocidaires, qui nous rappellent combien il est important de continuer, inlassablement, à lutter contre les négationnismes, la violence, l’intolérance et le repli sur soi. Dès lors que quelques-uns s’engagent sur la voie de la discrimination et de l’exclusion, aucune faiblesse, ni aucun compromis, ne sont acceptables. Les liens indéfectibles qui unissent les Hauts-de-Seine et l’Arménie, nous engagent à porter au plus haut point cette exigence, et à garder vivante la mémoire du passé, pour mieux éclairer l’avenir.

Georges Siffredi
Président du conseil départemental des Hauts-de-Seine et vice-président de la Métropole du Grand Paris

par La rédaction le dimanche 13 juin 2021
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Photo : © CD92/Olivier Ravoire




 
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