THEATRE Rubrique

La fin de l’homme rouge, ou l’histoire d’un Roméo azéri et d’une Juliette arménienne


Adaptation du Prix Médicis essai 2013, avec notamment une histoire d’amour entre une Arménienne et un Azéri.

Récompensé par le prix Médicis essai en 2013, La Fin de l’homme rouge de Svetlana Alexievitch remonte les vingt années qui nous séparent de la chute de l’Union soviétique. Sur scène, de jeunes acteurs, chanteurs, danseurs font résonner les voix de centaines de témoins brisés dans un requiem étonnant. La parole est au centre de ce spectacle, enfouie, chuchotée ou proférée. Il y est question notamment d’un amour impossible entre une Arménienne et un Azéri. Le spectacle restitue le chapitre Où il est question de Roméo et Juliette… seulement ils s’appelaient Margarita et Abudlfaz. Elle, Arménienne, et lui, Azerbaïdjanais, croyaient en l’amour. Mais entre 1988 et 1994, le pogrom contre les Arméniens a déclenché des massacres en chaîne… On reçoit le récit poignant et poétique de cette jeune femme en plein cœur, admirablement retranscrit par la romancière et restitué par les interprètes.
Sur la scène, il y a des acteurs. Leur corps dans l’espace, leurs voix et les mots ; les histoires qu’ils nous content, ensemble, en un chœur, puis à tour de rôle ils s’avancent au-devant de la scène pour interpréter des gens de tous âges, de toutes conditions sociales, ayant vécu ou non l’ère soviétique, tel un coryphée. Ils ne forment qu’un seul corps, un seul souffle, une seule âme, acteurs, passeurs d’histoires. Svetlana Alexievitch (prix Nobel de Littérature 2 015), avec une acuité, une attention et une fidélité uniques, s’acharne à garder vivante la mémoire de l’URSS, à raconter la petite histoire d’une grande utopie.

Dans le prolongement de son travail sur La fin de l’homme rouge ou le temps du désenchantement, Stéphanie Loïk a adapté et mis en scène Dix histoires au milieu de nulle part, la seconde partie de ce roman-document. à partir d’interviews de femmes et d’hommes de tous âges et de toutes conditions sociales, elle réinvente une forme littéraire polyphonique, singulière, qui fait résonner les voix de centaines de témoins : des humiliés et des offensés, des gens de bien, d’autres moins biens, des enthousiastes de la perestroïka ahuris devant le capitalisme triomphant et, aujourd’hui, des citoyens résistant à l’instauration de nouvelles dictatures ou se revendiquant de ces dictatures.

Claire Barbuti

Du 6 janvier au 3 février
L’Atalante - 10 place Charles Dullin - 75018 Paris
Réservations : 01 46 06 11 90

par Claire le jeudi 10 janvier 2019
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