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L’ombre de Mikaël Chirinian, en quête intime des origines


« On a tous une histoire. Et on connaît tous des fables. Nos histoires sont vraies, et nos fables des mensonges. Pourtant, ces mensonges nous éclairent sur nos propres histoires » : c’est par ces mots que Mikaël Chirinian commence sa pièce L’ombre de la baleine, son troisième seul en scène (après Rapport sur moi en 2007 et La liste de mes envies en 2013). Un an et demi après l’avoir joué au théâtre de la Villette, il le reprend au théâtre Lepic (anciennement Ciné 13 théâtre), en alternance avec deux pièces qu’il a mises en scène : Chatons violents d’Océan et la comédie J’aime Valentine mais bon.

Dans L’ombre de la Baleine, comme à son habitude, le comédien s’amuse à jouer une multitude de rôles de façon magistrale (femme, homme, enfant), mais cette fois des rôles beaucoup plus personnels puisqu’il s’agit de membres d’une même famille, très inspirée par la propre famille du comédien…

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Une marionnette qui ressemble trait pour trait à un Mikaël Chirinian avec quelques années de moins se trouve en plein cataclysme familial, pris en étau entre une sœur aux portes de la folie et des parents, dépassés, qui se réfugient dans les westerns et la cuisine. Tous deux portent eux-mêmes un lourd poids sur leurs épaules puisque le père est d’origine arménienne alors que la mère est Juive. « Je ne lui avais jamais dit… J’ai épousé un mari qui lui aussi avait vécu un génocide - comme quoi, il y a des sensibilités », exprimera la mère jouée par Mikaël Chirinian. La folie semble ainsi être une composante de l’histoire familiale, puisque le fils rappelle l’histoire du grand-père Babik, qui avait 10 ans lorsque son père a été décapité sous ses yeux par les Turcs. « Quand j’entends ma sœur qui crie, c’est encore et toujours les mêmes cris  », maugréera le fils qui, pour échapper au drame familial, embarque pour un voyage intérieur en mer avec Moby Dick.

Les scènes familiales puissantes sont ainsi entrechoquées par ces scènes poétiques tout aussi tragiques en mer, grâce à une sobre mise en scène d’Anne Bouvier et une belle mise en lumière de Denis Koransky. « En plongeant dans Moby Dick, c’est l’ombre de mon enfance qui m’est apparue », confie Mikaël Chirinian. C’est une vraie quête intime des origines que le comédien propose. Après avoir décrit et campé les névroses des autres, il aborde avec beaucoup de poésie et de justesse sa propre histoire. Jusqu’à une sublime fin, avec un pop-up réalisé par Natacha Markoff qui nous fait plonger dans un décor à la Michel Ocelot et lance un beau message de résilience…

Texte : Claire Barbuti / Photos : William K

Teaser l'ombre de la baleine au théâtre Lepic from Sébastien Cotterot on Vimeo.

L’ombre de la baleine, de Mikaël Chirinian et Océan
A partir du 15 décembre
Théâtre Lépic - 1 avenue Junot - 75 018 Paris

par Claire le lundi 17 décembre 2018
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