JEANINE PALOULIAN Rubrique

Képénékian : Monsieur loyal… de Lyon


Alors que la totalité de la communauté arménienne de Lyon jurait depuis des mois que « Kepé » (entendez Georges Képénékian, élu maire de Lyon en juillet 2018, en remplacement de Gérard Collomb devenu ministre de l’intérieur) serait la prochaine tête de liste municipale à Lyon en 2020, l’annonce par Collomb de reprendre son siège puis d’être à nouveau candidat dans un an et demi en a douché plus d’un. Les plus excessifs considèrent, à tort, que « Kevork n’était qu’une marionnette chargée de garder la place au chaud » en opposition aux groupies qui font leur miel de ces « 16 mois inespérés ».

Les uns et les autres ignorent ou font semblant ignorer que Georges Képénékian est d’abord un homme loyal à Collomb, de surcroit son médecin.

Loyal, Képé l’a toujours été. A sa vocation médicale, à son engagement au sein du dachnaksoutioun, à ses convictions philosophiques, à ses activités hospitalières, et … en même temps à la culture lyonnaise. Comment oublier que lorsqu’il accepte d’être l’adjoint à la culture de Gérard Collomb, en 2008, dans le monde du théâtre et de la danse on se gausse. Prudent, l’opéra penche pour le « wait and see  », mais au sein des compagnies on ironise sur ce chirurgien qui vient pour « tailler à coup de scalpels ». L’année suivante, dans le bilan d’un an d’affaires culturelles, publié par le quotidien régional le Progrès, il fallait encore chercher à la loupe les satisfecit des cultureux.

Képé s’est tu et a travaillé. C’est tout juste s’il s’est parfois laissé aller à lâcher « à Lyon c’est toujours un peu complexe ». Il a apaisé les ego un par un, vu des centaines de spectacles, même les mauvais, choisi de se coucher tard pour repartir très tôt au bloc opératoire. Il a tissé sa toile pas à pas, baume dans une main, bistouri dans l’autre. Le parcours de Képénékian pour improbable qu’il soit est aussi celui d’un travail, méthodique, constant, acharné, aussi discret qu’efficace.

Collomb a non seulement apprécié la performance mais aussi pris la pleine mesure de la solidité de Georges : droit comme une colonne de temple. Il en a donc fait le gardien, et en même temps la clé de voûte.

Georges ne pouvait ignorer cela, de même qu’il ne peut ignorer à quel point la fonction ministérielle, particulièrement le portefeuille de l’intérieur qui exige une disponibilité permanente, peut être épuisante, surtout pour un septuagénaire.

Pendant la campagne électorale de 2014, il n’avait quasiment pas quitté le chevet de son maire, alors assommé par une défaillance pulmonaire et absent des tribunes pendant dix jours. Lors de la crise de ces derniers jours, car entre Gérard Collomb et Emmanuel Macron, il s’agit bien d’une crise. Le sage provincial qui a porté un jeune rebelle ne reconnaissant plus son « fils adoptif » tranche le cordon ombilical. Durant ces trois jours, Képé n’était pas loin de la place Beauveau, n’ignorant rien. Ni de la déchirure, ni de la partie de dames qui se jouait aussi en arrière-plan.

La photo publiée dans le Figaro du 3 octobre est un parfait raccourci de la nouvelle situation. Au premier plan : Georges Képénékian maire de Lyon fait la grimace. Derrière lui Gérard Collomb, qui n’est plus ministre, attend les bras croisés, la tête légèrement penchée encore…à gauche.

L’un et l’autre ont déjà écrit le contenu du scénario à venir. De retour à Lyon Collomb s’inscrit dans le sillage d’Herriot, maire de Lyon… jusqu’ au bout. Quitte à s’affranchir des étiquettes politiciennes pour capitaliser sur son seul nom. Comme l’avait fait, en son temps,

le successeur direct d’Herriot, Louis Pradel. Une capitalisation et un patronyme faisant aussi office de gilet pare-balles pour Caroline, son épouse, référente du mouvement en marche à Lyon.

Et Képé ? Loyal, fidèle, gardien veillant au grain. Rien ne lui échappera des gestes et décisions du maire de Lyon, qu’il soit ou non le porteur de l’écharpe. Un monsieur loyal dans tous les sens du terme.

Jeanine Paloulian

Louis Pradel, maire de Lyon avait, pour la compagne de 1965, fait de son nom l’acronyme de la liste qu’il présentait : « Pour la Réalisation Active Des Espérances Lyonnaises ».

par Claire le mercredi 10 octobre 2018
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