Noires et sombres nos maisons pendant des siècles,
Tristes et pensives nos églises.
O pierres noires, O pierres noires
Pierres rongées par le deuil,
Vous étiez notre compagnie
Dans le désastre et dans le sang.
Et vous disiez tout bas ce que nos cœurs taisaient.
Seules amies au long d’un destin noir,
O croix de pierre sur les tombes,
Pierres des chapelles, pierres des temples,
Usées par les prières et les genoux des Arméniens
Pierres des cierges, noires, plus que noircies.
Dans la terre se cachaient des pierres de couleur
Pierres de joie, pierres de rire
Comme une braise de vermeil parmi la cendre
Comme l’espoir au creux des cœurs.
Pierre de pourpre et d’incarnat,
Pierres, O fleurs épanouies,
Apothéose ensevelie pendant des siècles,
O prisonnières de la terre,
Vous avez jailli du fond des cœurs anciens
Et vous resurgissez, déchirant l’ombre noire
Vous dressez nos colonnes
Vous vous changez en voûtes d’arc-en-ciel
Vous souriez, fleurs éternelles
Aux hommes et à la lumière.
Sur quelle terre existe-t-il autant de vie
Tant de couleurs et tant de joie
Enfouies dans la vieille prison des millénaires ?
J’ai foi dans l’avenir de mon peuple.
Sylva Kapoutikian, Méditation à mi-chemin, 1961, in Poésie arménienne, Anthologie des origines à nos jours, réalisée sous la direction de Rouben Melik, Paris, Les Editeurs Français Réunis, 1973 (édition épuisée *).
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