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Un leader de l’opposition arménienne appelle l’armée à désobéir aux éventuels ordres du gouvernement relatifs à la cession de territoires à Bakou


Fort de l’influence qu’il pense encore avoir dans un appareil militaire arménien qu’il dirigea en qualité d’officier et de ministre de la défense, Seyran Ohanian, leader du groupe parlementaire de l’alliance Hayastan, principale force de l’opposition dans le Parlement arménien, a appelé jeudi 21 mars l’armée à désobéir aux ordres du premier ministre Nikol Pachinian relatifs à un retrait de territoires frontaliers exigés par l’Azerbaïdjan, dont le dirigeant arménien n’a as encore clairement établi s’ils appartenaient ou non à l’Arménie. Le flou entretenu par Pachinian et son équipe ces jours derniers concernant le sort de ces villages situés dans la province septentrionale arménienne du Tavoush ne laisse pas place au doute selon le responsable de l’opposition, qui estime que le premier ministre arménien a bien l’intention de céder unilatéralement ces territoires à Bakou, une mesure qu’il a qualifiée d’illégale, faute de quelque mécanisme mutuellement reconnu en vue de la délimitation de la frontière arméno-azerbaïdjanaise. Pachinian avait défendu ses plans lundi lors de sa visite de deux des villages de la province du Tavoush, dont il est d’ailleurs lui-même originaire, proches des communes abandonnées qui avaient été occupées par l’armée arménienne lors de la première guerre du Karabagh, en 1991-1992. Il avait affirmé devant les habitants des villages concernés, à juste titre inquiets, que l’Azerbaïdjan attaquerait l’Arménie s’il n’en obtenait pas le contrôle. Il avait reconnu dans la foulée que Bakou n’entendait rendre aucun des territoires arméniens de la province du Tavouch que les forces azéries avaient occupés au début des années 1990. “Qu’est-ce cela, sinon une trahison du peuple de l’Arménie ?”, s’est exclamé Ohanian lors d’une conférence de presse en ajoutant : “Il y aurait probablement matière à engager des procédure légales ici s’il ne prend pas l’initiative de telles mesures ”. “Je pense que les personnes impliquées dans ce processus doivent rendre des comptes ”, a poursuivi l’opposant en précisant : “De plus, je pense que dans les zones frontalières, en Arménie [dans son ensemble] et dans l’armée elle-même il y a des personnes intelligentes qui peuvent rejeter ce processus illégal ”. “Tout un chacun a le droit de rejeter ce processus criminel. Y compris les effectifs de l’armée. L’armée est une structure disciplinée qui défend notre pays. Ce que je dis ne signifie pas qu’il faille renoncer à cette défense mais plutôt rejeter des ordres illégaux ”, a poursuivi le général à la retraite qui exerça la fonction de ministre de la défense de 2008 à 2016, sous la présidence de Serge Sarkissian, avec lequel il prit ensuite ses distances pour se rapprocher de l’ex-président Robert Kotcharian. Liée à ce dernier, l’alliance Hayastan de Ohanian et l’autre bloc de l’opposition représenté au Parlement arménien, Pativ Unem, lié quant à lui à S.Sarkissian, estiment que les concessions territoriales auront non seulement des graves conséquences sur la sécurité des communes concernées du Tavoush, mais affecteront la sécurité du pays tout entier. Ohanian a ainsi réaffirmé que la cession des zones frontalières nuiront à l’intégrité des positons de l’armée arménienne dans le Tavoush qui n’ont cessé de se fortifier au cours des trois dernières décennies. Les villages aujourd’hui en ruines réclamés par Bakou occupent des positions stratégiques le long de l’une des principales routes arméniennes conduisant en Géorgie ainsi que du gazoduc acheminant le gaz naturel russe vital en Arménie. Pachinian avait déclaré le 12 mars que les sections locales de cette infrastructure impactées par d’éventuelles cessions à Bakou devraient être déviées “de telle sorte qu’elles passent par le territoire de jure de l’Arménie ”.

par Garo Ulubeyan le vendredi 22 mars 2024
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